Rendez-vous mystère
au cœur de la nuit

La nuit s'annonçait particulière.

Dans la matinée, Charlotte s'était rendue au quartier général de la team Elo Roque pour de la paperasse. Elle avait choisit d'y aller avant même les premiers rayons du soleil afin d'éviter de croiser qui que ce soit. A ces heures là, il n'y a que les larbins qui font le ménages et quelques secrétaires aux yeux cernés d'heures supplémentaires. Comme cette chétive dame qui s'attelait à épingler des annonce sur un tableau d'affichage de couloir. Une fois qu'elle était partie pour se rendre à un autre tableau, charlotte avait jeté un coup d'œil, curieuse des actualités ici bas. Et quelles actualités ! Enfin, en soit rien de folichon par rapport à l'accoutumée mais... un élément attira réellement son attention. Une promotion de poste. Une évolution de rang. Un nom qu'elle n'avait jamais vu auparavant. Enfin quelqu'un qui n'était pas venu dans le groupe pour faire de la figuration. Elle ne le connaissait pas mais avait fortement envie de voir quel personnage pouvait être cette personne.
Elle avait donc fait la chose la plus simple au monde : une invitation. Charlotte étant ce qu'elle était, elle y avait sa petite touche de séduction et de secret. Les membres de la team sont souvent de grands curieux, quelques mots, aucune précision et un baiser aurait attiré n'importe lequel d'entre eux comme le pollen attire les papillusions.

Alors voilà, excitée de cette soirée mystère, Charlotte avait passé la journée à se préparer. Elle devait faire impression coûte que coûte. Vu les moyens qu'elle dépensait chaque fois qu'elle se rendait en safari, il est clair qu'elle était prête à dépenser dix fois plus pour impacter cette soirée. Elle devait être représentative d'elle-même. Elle devait montrer son charme, son charisme mais en même temps sa dureté : tel le Dragon qu'elle est.

Elle avait donc attaché une partie de la longueur de ses cheveux, coiffé correctement sa frange. En ce moment, ils étaient sur une teinte argentée nuancée de pastel mauve. Le liner autour de ses yeux aurait rendu jaloux n'importe quelle influenceuse tellement il était précis et ciselé. Il était agrémenté d'un peu de fard à paupière pâle rappelant les nuances colorées de ses cheveux, mettant en avant la couleur de ses yeux de reptile. Quant à sa tenue... Elle avait opté pour quelque chose de sobre à ses yeux (pour une fois?) : un pantalon de costume, taille haute, cintrée aux hanches par une ceinture fine de cuir. Ceinture non visible car le seul haut que Charlotte avait choisit d'enfilé était une veste de blazer à bouton unique qui offrait un décolleté des plus osés et pourtant... elle n'était pas si vulgaire ? Pas à son goût en tout cas. Au contraire. Charlotte était toujours très sûre d'elle, certaine de ses choix et ne ressentait aucune honte à mettre sa personne en valeur. Après tout, elle était la chose la plus importante à ses yeux.

J'fais pop la tête et l'outfit :

Alors que la nuit était déjà tombée depuis longtemps et malgré son impatience à rencontrer son inconnu, Charlotte n'avait absolument pas l'intention d'arriver à l'heure ni d'être en avance. Elle s'était donnée pour mission de se faire légèrement attendre. Cinq minutes de retard ce n'est pas assez pour l'effet escompté. Dix est à la limite du trop et pourrait agacer son invité. Sept minutes était le timing parfait.

C'est donc avec sept minutes de retard que Charlotte passa le pas de la porte d'entrée du bar. La lumière tamisée, l'ambiance légèrement vintage et classieuse, la jeune femme y était très à son aise. Il y avait de longs rideaux de velours par-ci par-là qui servaient d'habillage car aucune fenêtre ne donnait sur l'extérieur du bar. Il n'y avait pas d'extérieur d'ailleurs. C'était un bar en sous-sol. D'un côté de la pièce : une scène où se produisait un groupe de jazz. Les musiciens étaient toujours les mêmes, mais les chanteurs variaient d'une soirée à l'autre : ainsi l'ambiance changeait chaque soir. A ce sujet : pas de voix ce soir. Juste de la musique. Ce qui n'était pas plus mal car Charlotte était venue ici pour discuter et n'avait pas réellement envie d'être distraite ou de constater que son interlocuteur l'était.

Ses talons claquant sur le parquet, le Dragon fit une entrée remarquée dans l'antre. Le menton haut, elle ne balaya même pas la salle du regard et marcha droit vers le comptoir. Comptoir  où se trouvaient uniquement deux protagonistes. Le barman et son inconnu. Comment pouvait-elle en être aussi sûre ? C'est comme ça. Quand on a rendez-vous avec un inconnu, on ne va pas se cacher dans un coin : on reste visible. On est la première chose que l'autre doit voir. On doit être ce qui saute aux yeux, captiver l'attention de son partenaire anonyme. Et cet homme dans son costume noir, avec sa boucle chatoyante, dont les cheveux étaient plus blonds que l'or, enjolivés par les lumières de la pièce, était celui que Charlotte remarqua parmi tous les autres.

A mi parcours de son entrée, Charlotte croisa  le regard de la proie du jour. Il avait un petit air princier. La discussion qui s'annonçait déjà fort intéressante vis à vis des sujets que la jeune femme souhaitait aborder promettait d'être également agréable à regarder (oui, la discussion ça se regarde). Elle termina de s'approcher mais son air sérieux et impérial laissa place à un petit sourire en coin malicieux.

Sans dire bonjour, elle s'exprima la première alors qu'elle arrivait enfin au comptoir.

- Je vois que mon petit mot t'a plu.

Elle s'assit avec un tabouret d'écart (elle n'allait pas se coller immédiatement à son inconnu, un peu de tenue). Grande habituée du lieu c'est d'un simple signe de main quelle fit sa commande au serveur qui savait à quelle boisson correspondait chacune de ses gestuelles. Dans l'immédiat, elle avait commandé exactement la même chose que son charmant voisin. Elle patienta, tournée vers le membre de  la team Elo Roque. Un coude sur le comptoir, posant sa tête dans sa main, elle le dévisagea en quelques secondes. Elle nota la coquetterie de l'anonyme, son sens du détail et sa beauté. Son regard trahissait une belle intelligence mêlé d'une mystérieuse espièglerie. Le Dragon appréciait grandement ce qu'elle avait sous les yeux.

Le barman fit glisser le verre de whisky sur le bois lustré du comptoir. Le talent de se dernier était sans égal : la glissade s'arrêta pile au bon endroit pour être saisit. Connaissant par cœur sa cliente, il avait mis en équilibre dessus une petite brochette d'olives pimentées, avec les compliments de la maison.

Que cette délicieuse soirée commence.

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au cœur de la nuit

Se tournant face au comptoir (et surtout à son verre), les jambes croisées, après une longue journée de préparation et d'attente, Charlotte pouvait enfin savourer le commencement de cette soirée.  Quand son anonyme leva son verre, elle en fit autant pour trinquer à distance et se délecter d'une première gorgée de whisky. Du coin de l'oeil, elle avait pris le temps d'inspecter la bouteille qu'avait sorti le barman (et donc la même qui avait servit à remplir le verre de son doux voisin). Pas si mal.

Un Glenfiddch de vingt-six ans d'âge. Une bouteille de forme simple, ornée de motifs arabesques dorés, dont l'emblème était un cerf. Pourtant, à l'intérieur de cette fiole sobre, un nectar digne d'une royauté. Si Charlotte n'était pas sommelier ni professionnelle du monde des boissons alcoolisées, elle n'en était pas moins une grande consommatrice (en toute modération) et avait appris depuis longtemps à savourer la texture, les arômes et les saveurs des plus précieuses bouteilles.  Le blondinet se permettait donc des verres de cette valeur ? Intéressant.

Elle profita encore un court instant de ces arômes toastés qui s'échappait de son verre de cristal, écoutant la voix du jeune homme, le regard perdu dans les lueurs veloutés de la boisson ambrée.

Princesse ? Charlotte leva un sourcil pour seule réaction. Elle se considérait plutôt comme une reine ou une impératrice mais elle accordait à son interlocuteur que l'entreprise n'étant pas à elle mais à son insupportable père, elle n'était qu'une héritière sur une liste. Le terme convenait donc au sens premier. De plus, même si cette idée de princesse lui fit hérisser le poil dans un premier temps, elle devait avouer que ce petit surnom ne lui déplaisait pas totalement.

- Peut-être n'es-tu pas si bon que ça pour les paris ?

Attentive, elle inclina la tête légèrement sur le côté. Sans regarder son interlocuteur, elle sourit doucement à ses paroles.

- Hmmm je ne sais pas. Dis-moi blondinet, qu'est-ce qui a motivé ta venue à ce plaisant petit rendez-vous ? là, elle le regarda enfin du coin de l'œil, pivotant légèrement son visage vers lui pour montrer qu'elle n'évitait pas son regard. Au contraire, elle le soutenait et répondait à la malice dont il faisait preuve.Toi qui sembles aimer les petits jeux, peut-être pourrais-tu deviner ?

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au cœur de la nuit

Le toupet du garçon soutira un léger rire à Charlotte qui continua de soutenir le regard de braise de son partenaire de boisson.  

- Comme c'est étonnant... Ca ne l'était pas, bien évidemment. La majorité des membres de la Team Elo Roque avait son petit... penchant pour le "mal". Ainsi donc, il était véritablement un joueur dans l'âme. Tant mieux, cette information serait très certainement utile.

A la suite des paroles du jeune homme, Charlotte plissa les yeux avec un sourire en coin, elle aime tellement les compliments sur sa personne. Il était tout à fait dans le juste. Puis elle lâcha enfin, quelques millièmes de secondes, le regard flamboyant pour se retourner vers son verre de whisky qu'elle porta à ses lèvres pour en boire une nouvelle gorgée, avant de recommencer se duel de regard. Pourrait-elle faire de lui ce qu'elle veut en usant simplement de ses charmes ? Probablement pas et elle le savait. Un joueur malicieux tel que lui était certainement beaucoup trop malin pour se faire mener à la baguette juste par une simple tenue.

- Ma beauté éclatante, j'entends bien. Mais as-tu un problème avec ma tenue ? Je ne vois pas en quoi elle suggère quoi que ce soit. A moins que ce ne soit ton propre désir qui se reflète dans tes paroles ? les yeux de chats du Dragon jaugèrent l'énergumène de haut en bas, et elle perdit son sourire. Mais je doute que ma tenue soit réellement à même de t'émoustiller à ce point. Elle n'était pas si facile à convaincre.

Charlotte se leva de son siège et contourna celui qui se trouvait entre elle et son inconnu. Elle s'approcha de lui, sans lâcher son verre. Du haut de ses talons aiguilles, elle le dépassait d'une bonne tête tandis qu'il était assis. Serait-ce toujours le cas s'il se levait aussi ? Aucune idée. Mais elle se satisfaisait de cette domination subtile, pour quelques instants.
Elle était maintenant debout juste à côté de lui. Sa main portant son verre d'alcool était posée sur le comptoir mais elle lui faisait face. Totalement à l'aise dans cette petite comédie, elle avait un regard amusé. Elle ne se gêna pas le moins du monde pour remettre délicatement en place une mèche derrière l'oreille de son interlocuteur avant de se pencher justement à cet endroit pour lui souffler quelques mots en toute discrétion, laissant sa main proche de lui à la fin de son geste, sans pour autant le toucher d'avantage.

- Entends moi bien. Je te donnerai tout ce que tu désires si tu m'es utile, Eleazer Royce.

Elle dévoilait enfin ses premières cartes. Premièrement, oui, elle connaissait l'identité du garçon. Secondement, oui, elle avait mené son enquête et connaissait, sans grands détails toutefois, les intérêts de ce gentleman pour l'argent.

Pendant un instant où le temps semblait s'être figé, seul le doux son du saxophone résonnait comme un chant, accompagné d'une batterie et d'un piano. Un jazz apaisant, chaleureux et séducteur qui s'accordait parfaitement avec l'ambiance qui régnait au bar entre les deux vilains. La clientèle de cet établissement était plutôt du genre discrète et paisible. Il n'y avait pas une voix plus forte qu'une autre. Si bien que Charlotte n'avait aucun doute qu'Eleazer l'avait bien comprise.

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au cœur de la nuit

C'était comme un combat sans mouvement. Tout ce jouait dans les regards des deux vilains. Charlotte, cependant, n'était pas du genre à tourner autour du pot indéfiniment. Quand Eleazer lui indiqua qu'elle devrait se méfier de ses propres mots et du destinataire à qui elle les confiait, ça l'ennuya. Pas dans le sens figuré où elle était contrariée, mais littéralement. Cette réponse était d'un ennui. Impossible pour elle de cacher son expression : elle inspira profondément en levant les yeux au ciel pour se rassoir sur le tabouret le plus proche, faisant ce pendant toujours face à son interlocuteur.

- Aaah. C'est ennuyeux. elle inspecta sa manucure parfaite (comme elle d'ailleurs). Tournée face à son interlocuteur, elle croisa les jambes, celle surélevée venant ainsi frôler le jeune homme (non pas qu'elle lui faisait véritablement du pied mais, plutôt de la jambe), elle ajouta nonchalamment. En ce moment, je me moque des cœurs brisés. Et je trouve cette remarque bien irrespectueuse de la part d'un homme au cœur aussi froid que ses yeux sont de feux.  

Ses yeux à elle, de nouveau plantés dans le regard du charmant jeune homme, maintenant qu'elle avait perdu son sourire, étaient beaucoup moins accommodant. Dans une technique colorimétrique pure, Charlotte a les iris verts clairs avec des pupilles cerclées d'un marron extrêmement clair, à la limite de l'ocre. De les faits, ces nuances combinées et les différentes luminosités rendaient généralement son regard jaune ou doré, semblable à celui des félins et des reptiles. Des prédateurs. Et c'est l'attitude qu'elle adopta finalement. Fini les petits jeux de malices.

Elle prit une nouvelle gorgée de sa boisson alcoolisée qui, l'air de rien, s'était vidée plus vite qu'il n'y semblait.

- Je veux que tu saches faire ce que tu fais de mieux. Maitriser les paramètres. Je vais jouer avec quelque chose qui te dépasse sans doute et je veux être sûre de gagner. Je veux que tu fasses en sorte que les dés roulent en ma faveur. Est-ce que ce langage te parle, bichette ?

Il avait beau l'avoir reconnu, impossible pour Charlotte de savoir si son compagnon de beuverie de luxe était au courant ou non de la situation dans laquelle elle se trouvait maintenant à cause de cette put*** de Ludwina.

- Tu n'as pas à me répondre maintenant. Tu peux prendre le temps de réfléchir.

Charlotte, naturellement changeante, pouvait passer d'une émotion à l'autre très rapidement. C'est pourquoi, après cet air si sérieux quand Charlotte exposa explicitement sa demande, l'humeur joueuse revint Après tout, cette petite comédie qu'ils jouaient depuis le début lui plaisait bien. Maintenant que les cartes étaient dévoilées, rien n'empêchait de continuer à profiter de la soirée.
Et pour lancer une nouvelle partie, elle glissa sa main jusqu'au verre d'Eleazer pour le lui subtiliser, en profitant du geste pour effleurer les doigts du blondinet. Elle ramena le verre à elle et termina les deux petites gorgés qu'il restait. Un sourire en coin, elle se lécha discrètement les lèvres alors qu'elle faisait un signe au barman pour qu'il les serve de nouveau.

Ce ne serait pas la même bouteille. Cette fois, ce serait celle de Charlotte. Une qui lui était réservée. C'était également un Glenfiddch, mais si Eleazer avait commencé avec la Grande Couronne, Charlotte proposait le Grand Yozakura, de 3 ans plus âgé que le précédent. Probablement trois fois plus cher également. Mais cette démonstration de richesse de la part de Charlotte était plus un signe de bonté (c'est rare mais ça arrive) qu'un moyen de frimer. Elle n'avait pas l'habitude de partager ce genre de crus de collection.

- Et puis... Quand on y pense. Une princesse n'a-t-elle pas besoin de chevaliers servants dévoués à sa cause ? Elle paraissait presque innocente à cet instant, alors que deux nouveaux verres de whisky étaient en train d'être versés.

Rendez-vous mystère
au cœur de la nuit

Les quelques instants qui venaient de se dérouler semblaient lunaires, d'un autre monde. Le barman, dans sa discrétion impeccable, ne pouvait s'empêcher de douter de ce qu'il voyait et entendait. Le gentleman était un habitué des membres de la team Elo. Il avait souvent à faire à certain d'entre eux et n'y voyait aucun problème : ces gens étaient souvent forts bien élevés et le protégeaient officieusement des pokémons trouble-fêtes qui s'invitaient parfois dans son établissement.
Cependant, il avait pour habitude de les voir mauvais, ronchons, effrayants. Les deux au comptoir faisaient partis de ses" clients " préférés. Le jeune homme était généralement discret, consommateur d'excellant breuvage et bon prince. Quant à la demoiselle, qui faisait toujours une entrée comme si l'endroit lui appartenait et son regard assassin d'Arbok sauvage faisait se tenir à carreaux le plus bruyant des pochtrons, elle avait l'habitude de remplir grassement sa caisse. Mais là.... C'était quoi ça entre ces deux ? De toute évidence, avec son ouïe fine, il s'agissait d'une première rencontre mais... Lui si discret... soudain si bavard et agité ? Et elle, souvent si froide et distante... devient tactile et souriante ?
Le gentleman, les yeux fermés, les lunettes au bout de nez et la moustache bien coiffée essayait ses verres avec un chiffon sec pour garantir l'inexistence de quelconque traces. Il paraissait d'un calme souverain pourtant... son palpitant caché sous son gilet et sa chemise battait à tout rompre. Il frétillait d'excitation et de curiosité. Est-ce qu'il assistait à la naissance de l'union de deux vilains ?

Charlotte ne répondit pas à Eleazer quand il insinua que son cœur pouvait s'enflammer. Mais elle fit une petite moue qui voulait "oh, toi ? Pauvre chou ". Le gamin n'avait pas froid aux yeux.

- L'automne arrive sur ses grands chevaux. L'alcool et le contact, c'est ce qu'il y a de mieux pour se réchauffer. répondit-elle avec un haussement d'épaule sans réaliser la bombe qu'elle venait de lâcha par ses mots.

Haaaaaaan. Se.... Se réchauffer ? Le contact pour... pour se réchauffer ?! Le Gentleman inspira profondément. Ces vilains lui feraient certainement la peau s'ils remarquaient qu'il écoutait leur conversation. Impassible. Indétectable. C'est un professionnel. Ils le sont aussi, mais dans leur domaine.

Cependant, entendre qu'Eleazer n'avait pas l'envie de lui refuser quoi que ce soit (il n'a pas dit ça mais elle l'entend de la sorte) plu à Charlotte. Alors qu'elle était en train de prendre une gorgée de son nouveau whisky, elle manqua presque d'avaler de travers suite à la retenu qu'elle dû montrer pour ne pas rire à l'idée d'imaginer le petit prince agiter une épée dans tous les sens sans savoir quoi en faire véritablement. Une scène d'un ridicule si flagrant que Charlotte posa son verre et mordit sa lèvre inférieur pour garder un visage le plus impassible possible. Elle ne s'attendait pas à ça et en effet, l'imagine d'un voleur des basfonds, habile et secret lui convenait mieux. Elle n'ajouta cependant rien de superflu.

Ce qui l'a tira de son imagination, c'est la main d'Eleazer venant saisir la sienne. Elle posa son regard sur les sujets de l'action avant de relever les yeux pour retrouver ceux rubis de son interlocuteur. Entre sa touche d'humour et son soudain contact physique, lui qui en semblait bien avare depuis le début de cette entrevue, Charlotte se laissait prendre à revers. A moins que l'alcool n'agisse plus vite que prévu ?
L'homme s'approchait encore plus d'elle, mais elle resta droite sans pour autant soutirer sa main à l'étreinte qu'il avait entamé.  

- Tu travailles dur toute ta vie sur tes tours avec un objectif précis. Et un jour, un autre joueur débarques avec le même talent que toi mais il est, en plus, associé intimement à l'arbitre.... Tu as beau être le meilleur, l'adversaire te battra car il aura les grâces de celui qui dirige.... Ce que je souhaite est plutôt simple. Sa main libre (la gauche, celle sur le comptoir qui tient généralement son verre) se posa sur le bout du comptoir et positionna une olive. Charlotte fixait cette olive intensément, se plongeant dans ses paroles pour répondre au blondinet. Enfin elle fit marcher son indexe et son majeur sur le comptoir en direction de l'olive pimentée. Je suis une princesse enfermée en haut d'une tour qui essaie désespérément de la quitter par tous les moyens. Tout ce que je veux, c'est retourner dans mon royaume et... ses doigts arrivés à destination prirent la position pour donner une pichenette. Une violente pichenette qui expulsa l'olive loin. éliminer la Méchante Belle-Mère qui a ensorcelé le Roi.

Enfin, madame ! Qu'est-ce qui vous arrive ! Attention à mes verres s'il vous plait ! Et à ma vie. A ma vie aussi, j'étais juste là il y a un instant , pensa intérieurement le Gentleman qui s'était vu frôlé part le missile propulsé par Charlotte.

Une petite épine se planta dans le coeur de Charlotte à cette pensée. Elle n'avait jamais été particulièrement proche de son père mais s'était toujours arraché à la tâche et à l'époque, il était fier d'elle. Il était fier d'avoir une fille digne de son empire, si mauvais soit il. Cette époque où Charlotte pouvait sourire et admirer les épaules larges de son paternel qu'elle considérait comme imbattable, qu'elle admirait, semblait si loin. Est-ce qu'elle le haïssait maintenant ? Elle n'en était pas sûre. Pourtant, elle n'avait plus la même admiration.

Même si cela était romancé, elle venait là de livrer des détails bruts sur l'état de sa situation et peut-être sur l'état de son cœur. Il était clair qu'elle n'avait pas trimé toute sa vie pour finir comme ça. Elle allait récupérer sa place et plus encore. Il y avait de l'ambition dans cette réquisition forcée mais aussi de la vengeance. C'était politique et personnel. Impossible pour Charlotte de délier les deux. Elle s'enflammait à l'idée de tout brûler : la team, les sbires, sa mère inutile, son père corruptible et surtout Ludwina. Celle là, elle lui réservait quelque chose de pire que la mort.

- C'est un pari risqué pour toi bichette. Jepense cependant que le jeu en vaut la chandelle. Ceci dit, note bien que cette offre ne tient qu'au fil de la loyauté et de la discrétion.  

Elle le regardait enfin, elle ne divaguait plus à ses pensées sombres même si ça n'avait duré qu'une seconde. Charlotte souriait de nouveau.
Alors qu'Eleazer rompait le lien tactile de leur main et semblait se redresser de son côté, Charlotte saisit son bras soudainement et le tira à elle brusquement, se rapprochant également, pour que les deux se retrouve nez à nez. Que leur parfum respectif puissent s'enlacer.

- Mais c'est bien pour ça que je te fais une offre sans limite.

Elle le libéra alors et se redressa. Ce dernier geste lui redonna un peu de contenance. Parler de sa situation personnelle n'était pas dans ses habitudes et Charlotte s'était un instant sentie faiblir : elle venait d'exposer une faiblesse et en avait horreur. Connaissant le personnage, l'humeur du Dragon allait bientôt ressortir et tout détruire.

Rendez-vous mystère
au cœur de la nuit

Charlotte ne quittait pas Eleazer des yeux. Son regard d'or se plongeait dans celui de rubis du blondinet. Elle affichait un air très sérieux et imperturbable. Elle l'écoutait attentivement. Elle le fixait et en même temps c'était comme si elle ne le voyait pas. Elle était plongée dans une profonde réflexion avec elle-même. Elle n'était pas certaine de pouvoir faire confiance à cet homme et pourtant, elle en avait follement envie.

Quand il saisit sa main pour l'approcher de lui, elle ne réagit pas. En revanche... Au contact des lèvres chaudes d'Eleazer sur sa main froide, un frisson parcouru la nuque de Charlotte. Ses sourcils s'élevèrent à peine. Son regard s'agrandit. Ses lèvres à elle se desserrèrent. Elle inspira profondément. Son expression faciale n'avait que très peu changé et pourtant, elle cherchait à cacher son étonnement. Elle le voyait maintenant.

Quelle était cette pression sur son échine ? C'était désagréable. Comme si elle avait froid et qu'elle mourrait de chaud à la fois.
Ca n'avait duré qu'un millième de seconde. Elle ne voulait plus jamais ressentir pareil sensation. Ou... Peut-être bien que si ?

Troublée, elle finit par lâcher le regard de braise de l'homme qui se trouvait face à elle. A la place, elle se tourna vers les musiciens qui jouaient sur la scène.   Les lumières tamisées, le doux son du saxophone et du piano. Ca semblait enchanteur. Là encore, elle eut l'impression, pendant un court instant, de découvrir le monde. « C'est quoi c'bordel ? » pensa-t-elle ? Pourquoi sa tête semblait si confuse tout à coup ? Est-ce parce qu'elle s'apprêtait à faire une alliance avec un parfait inconnu ?

Charlotte se retourna vers Eleazer. Il attendait certainement une réponse à ses derniers mots, mais elle avait l'impression que son cerveau était devenu soudainement bien vide. Que dire ?
C'est la qu'elle remarqua qu'elle n'avait pas récupéré sa main. Bien qu'elle ne soit plus aux lèvres de son interlocuteur, ce dernier la tenait toujours dans la sienne. Devait-elle la retirer ? Devait-elle la laisser ? Pourquoi d'un coup elle se posait autant de questions inintéressantes ?! Ca avait le don de l'agacer intérieurement.

- Je vais donc te prendre au mot, petit prince.

Elle n'avait rien trouvé de mieux à dire sérieusement ? Si peu de contenance. Si peu de prestance. Cela ne lui ressemblait pas.



Elle avait besoin de lui ! Un Gentleman sait très bien reconnaitre une demoiselle en détresse. Surtout lorsqu'il s'agissait d'une cliente habituée. Bien qu'il ne sache pas non plus en quoi elle était en détresse, car elle semblait bien plus dangereuse que le charmant jeune homme qui l'accompagnait.

Alors, le barman fit ce qu'il savait faire. Il servit deux shots d'un alcool secret de sa propre confection qu'il déposa sans un mot aux côtés des deux vilains.  

Charlotte fut attirer par le geste du barman qui déposer deux verres, offerts par la maison. Comme s'il avait compris qu'elle et Eleazer allaient former une alliance.

- Hm... Il semble qu'on ait de quoi sceller notre accord maintenant. elle saisit le petit contenant, veux-tu trinquer avec moi, alors ?